Brûler les livres

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Ce vendredi matin, je suis triste et joyeux.
Tristement joyeux, disons.
Tristement triste surtout. Parce que je n’y peux rien. Tout nous échappe. Y a-t-il des pilotes ?
Nous avons pris cette fâcheuse habitude de confier notre sort aux dirigeants. Mais les dirigeants tâtonnent, sont mal informés et donc peu rassurants.

Je ne devrais pas me casser la tête avec cela. J’essaie d’ignorer, de ne pas me laisser submerger par les infos qui ne cessent de comparer les scores macabres des pays, des villes et des régions, pour chaque jour, pour chaque mois, …, et plus tard pour chaque …

Mais qui se souviendra de tout ça ? Qui se souvient encore du décompte quotidien des millions de morts de la grippe espagnole, il y a tout juste un siècle ?

Ce matin, je suis tristement joyeux. Parce que je me rends compte de l’étendue de mon ignorance. Devrai-je remercier le virus ?

Hier en fin d’après-midi je me suis incrusté dans un groupe de débat sur le film Fahrenheit 451. Aïcha Akalay animait la séance. Je me suis permis de donner un avis sur le film du point de vue de la relation entre l’être humain et le livre. Une relation qui n’a pas toujours été paisible. J’ai rappelé par exemple que les nazis avaient brûlé en 1933, dans une place centrale de Berlin et dans d’autres villes, des dizaines de milliers de livres.

Ce matin, par acquis de conscience, je me suis dit qu’il fallait que je vérifie mes informations sur ce sujet. Le site Wikipédia me confirme dans mes dires et mentionne une liste de 94 auteurs visés par l’autodafé, dont Karl Marx, Sigmund Freud et bien d’autres. Un autre nom attira mon attention, celui de Heinrich Heine.

Je veux en savoir plus sur ce qui a valu cet honneur à ce poète et j’apprends que Heine avait publié en 1821 une tragédie intitulée Almansor, dans laquelle « Heine s’intéresse pour la première fois, de façon détaillée, à la culture islamique en Andalousie mauresque, qu’il a célébré, toujours et encore, et dont il a déploré la disparition, dans de nombreux poèmes. »

Dans Almansor, en 1821, 112 avant que ses livres soient jetés au feu, Heine écrivait, prémonitoire : « Ce n’était qu’un début. Là où on brûle des livres, on finit par brûler des hommes. »

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