Réflexion de Marya Joudani

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Dans Feuilles d’Hiver, Taha cite ce Hadith où le prophète Mohammed dit que « nul n’est vraiment croyant tant qu’il n’aime pas pour l’autre ce qu’il aime pour lui-même. ». Dans cet article de 8 pages, Taha fait le recensement de quelques-unes de ces lectures durant cet hiver caractérisé par la sécheresse et le manque de pluie. Taha se rappelle de son travail dans la lutte contre les changements climatiques. Une cause qu’il a remplacée aujourd’hui par une autre plus urgente et prioritaire : La situation des jeunes marocains. Une situation dont ils sont à la fois les victimes et les responsables.

Dans ce monde changeant dans lequel nous vivons, où la jeunesse est animée par le besoin de gratification, l’éloignement de l’effort et la consommation de la junk culture ce qui résulte de l’imitation aveugle, le conformisme, et même l’obscurantisme.

La seule solution, Taha rappelle, est la lecture, la leit motiv à Connect Institute. Cette cause qu’il décrit comme étant évidente plaidée par notre écosystème et par tous les penseurs, artistes, dirigeants et autres personnalités sérieuses dans le monde. Pourquoi donc tellement de difficultés à en convaincre nos jeunes. Deux raisons me sautent à l’esprit : la langue et la technologie.

Dans “N’espérez pas vous débarrasser des livres”, Jean-Claude Carrière et Umberto Eco, nous dis Taha, échangent sur la place du livre face au développement de la technologie. Ils sont d’accord que la lecture et l’écriture n’ont jamais été plus importantes qu’aujourd’hui. Comment pouvons-nous nous servir d’un ordinateur si nous ne savons pas écrire et lire ? se demande Carrière. Et pour ceux qui disent que les liseuses numériques sont des outils plus durables que le livre et donc doivent le remplacer, Eco répond : le livre c’est comme la roue, maintenant qu’on l’a inventé on ne peut pas faire mieux.

Les jeunes de la génération Z n’ont jamais vu une cassette (peut-être même pas un CD). Ils ont par contre toujours été, d’une façon ou d’une autre en contact avec le livre. Quelle autre preuve de la place de la transmission écrite du savoir.

Être convaincu de l’importance de la lecture n’est pas suffisant pour s’y mettre. Cette citation de Jean-Claude Carrière me rappelle “Elle est terrible, la lamentation de ces mourants qui constatent que leur heure dernière est venue et qu’ils n’ont pas encore lu Proust”.
Je n’ai jamais touché à Proust. J’ai cette idée prédisposée que ce serait trop difficile, fastidieux pour moi qui ai toujours des difficultés en français. Proust rejoint tous ces écrivains que je lirais quand je serai plus grande.
Le dessin de Grant Snider, partagé par The New York Times à la fin de l’année 2021 décrit avec perfection ma relation avec les livres. Je me fixe un nouveau challenge (atteignable) : Parmi mes lectures cette année je mettrais deux classiques que je dois finir (Cent ans de solitude et Don Quichotte).

Durant une séance où nous avons présenté Proust aux participants, les jeunes que nous encadrons ont eu un problème avec sa sexualité. En plus des blocages linguistiques, de l’impact des nouvelles technologies, la religion et la tradition interviennent pour retarder le développement intellectuel de la jeunesse.

La liberté n’est-elle pas un préalable de la créativité ?

Mohamed Arkoun dans L’aspect réformiste de l’œuvre de Taha Hussein, critique principalement l’incapacité de ce dérnier, et d’autres réformistes musulmans à prendre assez de distance avec l’Islam ce qui a mené à leur échec.

Manque de distance et de courage.

Taha partage avec nous, les idées du penseur anglais Locke sur l’importance de distinguer entre ce qui regarde le gouvernement civil et ce qui appartient à la religion pour combattre le fanatisme.

Cette semaine, un barbu à Agadir a égorgé deux étrangères, parmi elles, une âgée de plus de 70 ans. Dans les médias, je lis qu’il n’était pas mentalement stable et que cela est un incident isolé.

Il faut appeler les choses par leurs noms pour pouvoir les combattre. Notre pays et sa jeunesse sont toujours menacés par le virus du radicalisme. “Les charlatans remplissent le vide créé dans les esprits des jeunes, puisque la nature a horreur du vide.” écrit Taha dans l’intro de notre newsletter cette semaine.

La lutte contre le terrorisme et l’extrémisme sous ses diverses formes ne peut se faire qu’à travers la culture. L’art n’est pas une simple forme de divertissement, c’est un outil d’apprentissage, de dialogue, d’expression des idées, de construction d’esprit critique et ouvert.

L’exposition, l’origine africaine de la civilisation au musée Métropolitain de New York symbolisée par deux sculptures, l’une venant d’Egypte et datant de plus de 25 siècles, l’autre venant du Mali et datant de plus de deux siècles, démontre que la créativité qui distingue l’esprit humain des autres créatures transcende les frontières et les différences.

La mission de Connect Institute est de contribuer à la résolution des problèmes cités. Nous avons créé et offrons nos espaces aux jeunes pour qu’ils puissent créer des réseaux, apprendre, échanger, innover et s’inspirer de personnalités qui ont réussi.

L’Être humain, m’a dit Taha un jour, est capable de faire le bon choix si on le lui indique. Taha rejoint la parole à l’acte (tout comme Colum McCann). Il fait ça en accompagnant des centaines de jeunes chaque année depuis plus de 6 ans. Il fait ça aussi en écrivant.

Tout ce travail ne doit pas être facile. Kaoutar Harchi, mentionnée par Taha décrit le fait d’écrire comme étant de la peine née de l’effort, mais qui est balayée lorsque ce que l’on écrit donne des résultats.

Isolée du monde à cause d’une deuxième atteinte de covid, je reçois ces textes qui éveillent en moi encore l’envie d’agir pour moi, pour les jeunes qui fréquentent nos centres et pour mon pays.

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