Chloé, étudiante en échange, a participé à la présentation au Wali

Total
0
Shares

Chloé est une participante de MAHIR Center, en échange. Comme 4 autres de ses camarades, elle a participé à la résidence artistique, à Connect Institute, de préparation de la rencontre avec le Wali d’Agadir. Voici le compte-rendu de son expérience.

“C’est simple, c’est encore une chose à rajouter à la liste des « si on m’avait dit il y a 3 mois que j’allais le faire, je n’y aurais pas cru ». J’aurais sûrement fait un grand sourire, cachée derrière mon masque, rigolé nerveusement et sorti sur un ton très cynique un « Mais oui, bien sûr, tu penseras à me prévenir que je ne sois pas en retard ce jour-là ! ». Pourtant c’est fait. Une vingtaine de jeunes, de la danse, du théâtre, de la musique, une équipe en or, et un Wali ravi. C’était beau et puissant, c’était stressant aussi. Je dois dire que je n’avais jamais réalisé la pression qui repose sur les épaules d’une personne à la technique, ou comment le moindre faux-pas peut déstabiliser quelqu’un sur scène ou pire encore. Mais à vrai dire, quoi qu’il ait pu se passer pendant cette heure, ce n’était rien comparé aux 5 jours qui ont précédés ce moment.

J’ai (re)découvert durant ces 5 jours la puissance d’un groupe soudé. Il avance, il prend de l’élan, il est entraîné par sa force, elle-même multipliée par tous ceux qui le compose. Il a la capacité de se frayer un chemin et de laisser son empreinte, mais aussi d’être renforcé par tout ce/ceux qui croise(nt) son chemin. En écrivant cela, je repense à une œuvre d’un artiste contemporain qui a travaillé notamment sur la mémoire du corps, The Yelding Stone de Gabriel Orozco (1992). Cette boule de pâte, composée de cire, profite de tous les incidents qu’elle croise sur son chemin pour fonctionner comme une empreinte et garder une trace de ce qu’elle a vécu. Ce sont ces traces qui lui donnent sa particularité. Et ce groupe a tout ça : des spécificités, des histoires, des expériences, et l’inertie de cette balle qui avance de façon déterminée dans une direction malgré les obstacles sur son chemin. Et ils ont découvert eux aussi, à travers ce groupe, ce qu’est la mémoire du corps, ou comment chaque sensation a un sens et un impact. Le corps en mouvement, le corps présent, le corps dansant.

[Contextualisation. Je suis arrivée à MAHIR en présentant un projet autour des jeunes et de la danse, comme finalité de mon master en management de projets culturels l’an prochain. Un projet qui laisse de la place à des jeunes de différents pays, de différents milieux, pour se faire entendre. Un projet qui nécessite tout autant les yeux que les oreilles, mais surtout l’esprit, le courage, l’entraide, la cohésion. Un projet qui leur donne des clés, mais dans lequel les jeunes sont au centre, dans lequel ils trouvent seuls la voie qui leur correspond. Un projet qui était beau dans ma tête, mais encore embrumé de questions et d’incertitudes. Retour à aujourd’hui.] Une vingtaine de jeunes marocains, danseurs amateurs à leurs heures perdues, entre les mains d’une danseuse professionnelle et d’un chorégraphe pour 3 jours. Une prise de conscience de l’autre, de l’espace, du temps, de mouvement, du groupe, et surtout d’eux-mêmes en tant qu’individu. C’est possible. C’est possible et c’est beau. C’est possible et ça me donne encore plus envie.

J’ai (re)découvert durant ces 5 jours la puissance de la détermination et de l’exigence. Quand elles sont volontaires et quand elles viennent du cœur. J’ai déjà parlé dans un autre écrit du faire, faire, et refaire. Ce groupe là le fait, ils le font tous. Ils le font et ils acceptent, ils le font même quand ils sont à bout. Ils le font et ils le font bien. Ils demandent des conseils et des retours. Ils écoutent et prennent en compte. Ils sont jeunes, nous sommes jeunes, mais ils ont cette conscience de l’importance des choses qui peut-être me manque encore parfois. Peut-être est-ce là encore l’effet magique de ce groupe, le fait de ne pas vouloir décevoir les autres, de le faire autant pour soi-même que pour eux, le fait d’être embarqué ensemble dans un projet qui leur parle. Quoi qu’il arrive ça fonctionne.

J’ai (re)découvert durant ces 5 jours l’importance de la danse à mes yeux. Pour mon bien-être tant physique que psychologique, pour l’émerveillement de mes yeux, de mon cœur, de mon corps. La petite chose que je me suis entêtée à cacher depuis quelques années est réveillée de son long sommeil, et n’a pas vraiment l’air de vouloir repartir. J’ai réalisé à quel point c’était dur d’être concentrée derrière mon ordinateur quand ils apprennent ou testent de nouvelles phrases, mouvements, situations. J’ai réalisé que si ce que je veux faire de ma vie, c’est faire briller le talent des danseurs et leur permettre une diffusion de leur art à tout ceux qui auront l’opportunité de s’arrêter pour en profiter, ça ne veut pas dire pour autant que je n’ai plus le droit de bouger. Être une part de l’ombre me plaît, mais une ombre en mouvement, une ombre en plein vent. Une ombre qui accepte de se laisser porter, de se laisser danser.

Au-delà de tout ça j’ai hâte. J’ai envie, pour eux, de voir où tout ça va nous mener. Quelles sont les prochaines étapes ? Qui vont-ils rencontrer par la suite ? A quoi vont-ils se heurter et comment vont-ils passer outre ? A la vue de tout ce qui est fait en 5 jours, je n’arrive même pas à imaginer ce qu’il en sera fait 5 mois, ou en 5 ans. Nous avons fait cet exercice en rentrant à MAHIR, ce brainstorming dans lequel on a cherché avec d’autres participants les projets les plus fous qui pourraient arriver à La Coupole. Et une part de moi est persuadée que ce qui nous paraît fou aujourd’hui, se réalisera demain.”

Retrouvez toutes les actualités de Connect Institute

Recevez notre news lettre chaque mardi !

RECOMMANDÉS POUR VOUS