Analyse d’Inssaf Elhandoli sur la lecture et l’écriture

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Lire et écrire est la thématique de la nouvelle édition de NABNI. Ces dernières semaines, nos participants nous ont fait part de leurs réflexions sur ce thème.

Découvrez l’analyse d’Inssaf Elhandoli, 23 ans :

Le système scolaire « traditionnel » tend à définir le domaine de maîtrise des enfants et de les catégoriser en ne se basant que sur leur performance dans certaines matières. Les mathématiques se placent généralement en tête de liste, utilisées comme critère fondamental de qualification des doués et d’élimination des « autres », les plaçant dans la case « échec » durant tout leur parcours scolaire, voire toute leur vie. Les circonstances ont fait que je sois parmi les éliminés, car je me concentrais plus à compter les coups que je recevais du professeur qu’à compter les chiffres de l’équation.

J’ai appris les mathématiques, car il fallait que je fasse un Bac technique, sinon, d’après ma mère, je serais vouée à devenir le modèle type d’échec dans la société. Dès mon plus jeune âge, et sans m’en rendre compte, je me jugeais incapable de compter ou de résoudre les problèmes de maths ou même de chercher à les comprendre. C’est l’impuissance apprise, un phénomène étudié par les praticiens de la neuroscience, mis en évidence dans les années soixante et qui consiste à convaincre une personne de son impuissance. Une méthode adoptée par les cornacs qui attachaient les pattes du petit éléphant, qui grandissait avec l’idée qu’il ne peut évoluer. Et c’est exactement ce que la neuroscience a prouvé, qu’on apprend à pétrifier nos cerveaux. On a appris à croire à chaque expérience ou jugement qui nous qualifie d’incapable, puisque certains jugements se sont faits sur la base de la conformité et non sur nos potentiels et nos compétences individuelles.
Ce système binaire, rigide, qui conditionne les enfants d’aujourd’hui, citoyens adultes de demain, par un destin social aux effets plus difficiles à corriger qu’une deuxième chance pouvant être accordée ab initio, finit par ronger l’essentiel de l’humain, l’évolution.

Il y a quelques jours, j’ai eu l’opportunité de lire l’essai de Daniel Pennac « Comme un roman » où il dit : « Une lecture bien menée sauve de tout, y compris de soi-même ». Cet ouvrage désacralise la lecture et l’érige au rang de droit imprescriptible. La lecture, dans le monde auquel nous appartenons, procure des éléments de bien-être qui sont devenus luxueux dans notre existence, comme le silence, la solitude, la lenteur, vu que nous subissons des systèmes, de valeurs ou autres, qui empêchent l’individu de laisser libre cours à son imagination.

Un pays qui se cultive et qui cultive l’esprit de ses citoyens est en premier lieu un pays disposant d’une « élite » politique consciente des enjeux et de l’importance de l’ouverture et du développement intellectuel. Les raisons pour lesquelles la troisième République en France avait promis d’alphabétiser sa population étaient pour avoir des soldats qui sachent lire et écrire, ce qui garantit une meilleure exécution des ordres, et la deuxième promesse était de faire de son peuple des aristocrates, car ces derniers étaient le modèle de l’homme cultivé qui développe un savoir menant à consolider le point de vue étatique. C’est là où le rôle de l’État se manifeste, nous ne possédons pas cette volonté politique qui donne l’exemple et incite son peuple à lire, en créant des espaces de lecture avec des librairies génératrices de passions, et créatrices de valeur ajoutée sur le plan humain.

Le livre est plus qu’un bouche-trou ou un accessoire pour notre bibliothèque, c’est bien plus qu’une étiquette sociale ou un raccourci vers l’ascenseur social, c’est avant tout une plume. La plume qui écrit l’avenir des civilisations et des nations, la plume qui corrige les ratures des inconscients d’hier au profit des « lumières » de demain.

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